En résidence à la Place des Arts : Jasmine Ellis
Ontarienne d’origine, Jasmine Ellis a immigré en Allemagne, il y a quelques années, pour enrichir sa carrière de chorégraphe en danse contemporaine. Malgré la distance, le Canada n’est jamais très loin de ses créations et de son cœur. Invitée en résidence à la Place des Arts dans le cadre du projet Springboard Danse Montréal 2018, elle a présenté le fruit de son travail le 15 juin dernier. Gros plan sur cette artiste hors du commun.
Comment a commencé votre collaboration avec Springboard Danse Montréal ?
J’ai fait mes premières armes au Canada à l’école du Toronto Dance Theatre, où Springboard Danse Montréal est réputé. C’est l’événement idéal pour côtoyer des gens du milieu et se faire connaître, et il offre aussi l’opportunité de diriger un grand nombre de danseurs, une chance que je n’ai pas souvent en Allemagne. Je participe depuis deux ans au programme destiné aux artistes émergents, et cette année, j’ai pu intégrer le nouveau programme d’artiste en résidence. C’est un grand honneur, car en général, les artistes sont limités à deux participations afin de laisser la place aux nouveaux talents. Cela donne aussi l’occasion de revenir chaque été à Montréal. J’ai beaucoup de chance !
Que vous a apporté la participation à ces programmes ?
Grâce au programme pour les artistes émergents, j’ai acquis de l’expérience et j’ai fait ma marque. Je suis aujourd’hui une artiste confirmée, et non plus « émergente ». D’ailleurs, je l’ai ressenti en préparant ma création cette année. Je suis plus confiante. J’ai développé les compétences nécessaires pour travailler sur ce type de projet en un laps de temps très court et pour faire ressortir le meilleur de chacun. Le spectacle donné lors de chaque Springboard me permet de comparer mon travail à celui d’autres professionnels. Cela m’aide beaucoup à développer un esprit critique sur mon travail, à mettre en perspective mes atouts et les aspects que je dois encore développer.
Credit photo : Geneviève Dubé Interprètes : Lukas Malkowski et Dana Pajarillaga
Qu’avez-vous présenté cette année ?
J’ai présenté un duo de danseurs intitulé Back. La chorégraphie mettait en lumière un mouvement en séquence, présenté sous différentes perspectives. Cette pièce est la prémisse de ma création en cours, qui s’articulera autour d’un questionnement sur l’isolation sociale, de ce que cela signifie d’être avec des gens tout en se sentant seul. Les interprètes, Lukas Malkowski et Dana Pajarillaga, sont très talentueux. Ils ont réussi à donner vie à ma chorégraphie dans le temps limité qui nous était imparti, soit cinq jours.
Que pensez-vous de l’univers montréalais de la danse contemporaine ?
Montréal a une culture très riche dans ce domaine : il y a tellement de compagnies réputées, de danseurs talentueux et d’événements internationaux ! Lorsque je dis à des gens du métier que je suis canadienne, ils me parlent immédiatement de Montréal. Dans le monde de la danse contemporaine, la ville a une réputation bien établie, et de nombreux artistes des quatre coins du globe viennent ici pour tenter de percer dans le domaine.
Credit photo : Geneviève Dubé Interprètes : Lukas Malkowski et Dana Pajarillaga
Y a-t-il une différence entre travailler au Canada et en Allemagne ?
Oui, les méthodes de travail et la mentalité des professionnels, notamment, sont différentes. Je retrouve plus de clarté et de précision chez les danseurs au Canada. En Allemagne, les interprètes remettent régulièrement en question le processus de création. Je dois parfois les rappeler à l’ordre et leur dire : « Assez discuté, il faut commencer à danser ! » J’aime connaître leur opinion, mais souvent, c’est trop ! Avec les danseurs de Springboard, c’était l’inverse, il a fallu que je les incite à me dire ce qu’ils pensent de la chorégraphie. Quand on travaille dans plusieurs pays, il faut s’adapter aux gens, aux lieux, à l’histoire et aux façons de faire.
Est-ce que Montréal et le Canada vous inspirent dans votre travail ?
Beaucoup ! Je m’inspire des gens que je côtoie et de mon environnement. D’ailleurs, pour ma nouvelle création, j’ai fait des entrevues avec des Canadiens et des Allemands pour avoir leurs points de vue sur l’isolement social et savoir comment ils y faisaient face lorsqu’ils en étaient victimes. Mon spectacle sera une comparaison entre ces deux cultures auxquelles je suis reliée.
Songez-vous à revenir vivre et travailler au Canada ?
Souvent, mais mon partenaire vit en Allemagne et, pour l’instant, je ne me vois pas me relocaliser. Toutefois, j’ai vraiment le désir de venir et de produire mes chorégraphies au Canada plus souvent!