Éternel Orlando : un concert théâtral pour dompter l’œuvre complexe de Virginia Woolf
Attention : forme artistique nouvelle en vue ! Le légendaire roman Orlando, de Virginia Woolf, est revisité par l’Orchestre Métropolitain et la metteuse en scène Lorraine Pintal en un mariage subtil de théâtre et de musique symphonique. C’est la cheffe d’orchestre canadienne Naomi Woo qui manie la baguette et dirige un parcours musical conjuguant notamment des œuvres phares de Händel, Tchaïkovski, Haydn, Erik Satie et Nathalie Joachim.
Ah, cet Orlando ! La structure même de l’œuvre est un terrain de jeu artistique. Publié en 1928, le roman hors norme de Virginia Woolf brisait les codes de la biographie traditionnelle en faisant surgir fantasmes et réflexions composites sur l’identité. Orlando vit au-delà du temps, défiant les conventions et les règles pour explorer l’instabilité des genres et des identités.
Une traversée musicale
Du XVIe siècle à l’époque moderne, Orlando change de sexe, traverse des époques, rencontre des personnages historiques et philosophiques – les jalons d’une incessante quête d’identité et d’art. Si l’histoire d’Orlando est avant tout celle d’une transformation, elle a inspiré à l’Orchestre Métropolitain une célébration de la richesse musicale des âges traversés.
Le spectacle s’ouvrira sur la musique majestueuse de Händel, avec Royal Fireworks Music, avant de se poursuivre à travers les époques. De la cour de la reine Elizabeth I à la Russie tsariste avec Tchaïkovski, jusqu’aux sonorités plus contemporaines d’Erik Satie et de Nathalie Joachim, chaque morceau devient le compagnon sonore des grands moments de la vie d’Orlando. L’orchestre, dirigé par Naomi Woo, accompagne cette traversée du temps. Le théâtre et la musique se répondent, se complètent. Un véritable dialogue.
« La musique vient ajouter une dimension émotive aux propos d’Orlando, résume la metteuse en scène Lorraine Pintal dans une vidéo promotionnelle du spectacle. C’est une forme que je qualifierais de “concert théâtral“, ou de “théâtre en concert“. Les deux disciplines se croisent, mais ne se superposent pas, pour que chacune exprime sans entraves toute sa puissance. Mais cette cohabitation offre tout de même au spectateur une expérience totale. »
Des thématiques d’actualité
« Dans une époque où l’on interroge de plus en plus le genre, ce roman apparaît comme une œuvre visionnaire, poursuit Lorraine Pintal. Un jour, alors qu’il s’était assoupi sous un chêne, Orlando se réveille femme. Ce changement permet à Virginia Woolf d’explorer toutes les différences de traitement entre hommes et femmes, levant le voile sur les inégalités et les asymétries. C’est un roman au langage féministe qui résonne beaucoup avec celui de notre époque. »
Dans Orlando, interprété sur scène par la comédienne Rachel Graton, le personnage côtoie Shakespeare et Marlowe au XVIe siècle avant d’assister, bien des siècles plus tard, à l’avènement des grandes inventions du XXe siècle : l’électricité, le télégraphe, l’automobile. Ce voyage à travers le temps, fascinant et fantastique, est une exploration de l’évolution non seulement de la société, mais aussi des idées et des technologies. Voilà également de quoi nourrir des réflexions sur l’ère actuelle marquée par un virage numérique fracassant.
« Ce spectacle est une rareté, conclut Lorraine Pintal en vidéo. Il permet de s’imprégner de l’œuvre d’une autrice qu’on joue très peu sur nos scènes et de découvrir le voyage musical proposé par l’Orchestre Métropolitain. À mon avis, les thèmes abordés vont vous transformer, vous provoquer, vous faire rire et, surtout, vont alimenter votre réflexion sur l’époque dans laquelle on vit. »
L’histoire d’Orlando, jeune et vieille à la fois, est une invitation à explorer ce que nous sommes et ce que nous devenons. À ne pas manquer le 26 novembre à la Maison Symphonique.