Harmonium symphonique
Crédit photo : Victor Diaz Lamich
Crédit photo : Victor Diaz Lamich
Pascaline David - 11 mai 2023

Un printemps vivace pour Dina Gilbert

Des Grands Ballets au jazz, la chef d’orchestre québécoise Dina Gilbert est engagée dans une symphonie de projets: la trilogie Histoires sans paroles – Harmonium symphonique, une trilogie symphonique avec Dominique Fils-Aimé et la direction de l’Orchestre des Grands Ballets pour la pièce Cendrillon. Rencontre avec la directrice musicale du Kamloops Symphony Orchestra. 

 

Qu’est-ce qui vous anime dans les projets que vous menez? 

 

Chacun me nourrit différemment et me permet de voir le prochain d’un nouvel œil. Je me trouve tellement chanceuse de regarder mon agenda et de constater la diversité des choses que je fais. C’est une joie immense. J’aime aussi montrer au public que la musique symphonique est accessible à tout le monde. L’orchestre du 21e siècle peut tout faire, il est à l’écoute des tendances, des types de musique et il peut les valoriser. 

 

Qu’est-ce qui est fondamental en tant que chef d’orchestre?  

 

La curiosité, la communication et la préparation, puisque 90 % de la job de chef se passe avant la première répétition. C’est ça qui permet de se sentir véritablement libre d’interpréter, de vivre la musique et de la transmettre au public. 

  

La trilogie Histoires sans paroles – Harmonium symphonique propose trois expériences distinctes, et, on l’imagine, trois manières différentes de travailler. Qu’est-ce qui vous a plu dans cette proposition? 

 

C’est un projet vraiment trépidant, qui est issu de la créativité du producteur et directeur artistique Nicolas Lemieux et qui repose sur les incroyables adaptations symphoniques de Simon Leclerc. L’idée était de décliner l’expérience-concert en trois moutures. La première était à grand déploiement avec beaucoup de visuel, des acrobates. La deuxième, Pure symphonie, a été présentée une première fois en janvier dernier avec l’Orchestre symphonique de Montréal. Cette fois-ci, on enlève tout le décorum et l’amplification pour se concentrer sur la beauté de la musique, avec les voix de Kim Richardson et Luce Dufault. La Maison symphonique est parfaite pour apprécier cette formidable acoustique. La troisième mouture, qui aura lieu à l’automne prochain, sera jouée à l’église Saint-Jean-Baptiste. J’éprouve un grand plaisir à retrouver les musiciens que je connais; c’est rare d’avoir l’opportunité de travailler sur une même production plusieurs fois. 

  

Vous dirigerez également une trilogie symphonique avec Dominique Fils-Aimé. Comment décririez-vous ce projet, qui sort des sentiers battus?  

 

C’est un voyage de 75 minutes sans entracte à travers une sélection de chansons de ses trois albums. Dès la première rencontre avec Dominique et l’arrangeur Blair Thomson, j’ai vu tout de suite qu’elle avait une idée claire en tête. Dans ses albums originaux, elle enregistre et superpose plusieurs voix, qui seront reprises dans ce concert par les exceptionnels choristes de l’émission Y’a du monde à messe. On plonge dans le soul et le jazz avec la plume très allumée de Blair; c’est du jamais vu. L’artiste inuk Elisapie viendra par ailleurs présenter deux titres. Toutes ces pièces s’enchaînent de façon audacieuse et créent une métamorphose des chansons de Dominique. 

  

Avez-vous prêté attention à des aspects musicaux en particulier?  

 

C’était très intéressant de regarder certains paramètres pour ce projet. Par exemple, de réfléchir à comment faire « groover » un orchestre. Les choristes doivent s’habituer à la formule symphonique, et nous, on doit s’adapter à ces codes de mimétisme de la soul, du jazz et de rythmes moins communs. Je trouve que c’est le fun d’être le point d’attache et de jumeler ces deux univers si forts qui peuvent s’apporter beaucoup l’un à l’autre. 

 

Dans un tout autre style, vous dirigerez l’Orchestre des Grands Ballets dans la pièce Cendrillon, sur la partition de Prokofiev. Avez-vous pensé différemment votre pratique?  

 

Oui, car dans ce genre de production, les chefs d’orchestre décident de l’assise de l’interprétation, c’est-à-dire des tempos et des climax. J’ai rencontré la chorégraphe australienne Jayne Smeulders, je lui ai posé des questions et j’ai pris des notes. Je m’assure de m’imprégner de l’audioréférence, c’est-à-dire l’audio sur laquelle les danseurs répètent en l’absence de l’orchestre, et de comprendre les besoins des danseurs. Comme ça fait quelques années que je dirige les Grands Ballets, je connais les danseurs personnellement. Ils peuvent facilement me donner des lignes directrices, les tempos, quel mouvement marque le début et la fin d’une musique. En fait, on est au service des danseurs. Ensuite, je me rends aux répétitions pour les voir travailler et pour appréhender cette énergie physique. C’est un travail de longue haleine. Pour cette représentation montréalaise, les costumes sont revisités, il y a des personnages en plus. C’est fascinant de voir l’évolution de la chorégraphie! 

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