FTA : retrouver le pouvoir des arts vivants
Le quinzième Festival TransAmériques (FTA), qui s’amorce cette semaine, relève de l’exploit. Son comité organisateur a dû composer avec de nombreuses contraintes afin d’en concevoir le programme, qui constitue aussi le dernier tour de piste de son directeur artistique et codirecteur général, Martin Faucher. Pour son bonheur et celui des spectateurs, les 26 spectacles de cette année seront présentés devant public.
La Place des Arts accueille sept événements du Festival, qui se tient du 26 mai au 12 juin. Nous avons demandé à Martin Faucher de nous donner un avant-goût de cette présentation qui a pour principaux thèmes le pouvoir et le territoire.
Pleins feux sur de grandes artistes
Deux artistes au formidable parcours se produiront en solo à la Place des Arts : la femme de théâtre Marie Brassard, avec Violence, et la danseuse et chorégraphe Louise Lecavalier, avec Stations. « C’est important de programmer des spectacles dans un endroit qui peut bien cadrer l’œuvre présentée, estime Martin Faucher. Ces artistes sont deux immenses figures de la scène québécoise, et je trouve ça extraordinaire de les présenter à la Place des Arts. »
Violence est une création ambitieuse, transformée en solo par la pandémie, mais conçue en tandem avec une équipe au Japon. « La salle du Théâtre Jean-Duceppe va donner une belle ampleur au décor, au projet et aux images numériques. » Marie Brassard signe la mise en scène et l’interprétation de ce qui s’annonce comme « une aventure théâtrale vraiment excitante », selon le directeur artistique.
« Louise Lecavalier est probablement la danseuse contemporaine la plus connue des 40 dernières années, et le Théâtre Maisonneuve est tout à fait à l’échelle de l’artiste qu’elle est », déclare en outre Martin Faucher, heureux d’offrir la nouvelle œuvre de cette créatrice au parcours qu’il qualifie d’admirable. Avec Stations, la danseuse et chorégraphe livrera une performance intimiste, notamment portée par les compositions lancinantes du saxophoniste Colin Stetson.
« C’est important de programmer des spectacles dans un endroit qui peut bien cadrer l’œuvre présentée, estime Martin Faucher. Ces artistes sont deux immenses figures de la scène québécoise, et je trouve ça extraordinaire de les présenter à la Place des Arts. »
S’interroger sur le pouvoir
Trois spectacles s’inscrivent dans la série Port-Royal, un cycle de lectures qui cherche à raconter l’histoire autrement et qui a pour thème le rapport au pouvoir. Pour y arriver, Martin Faucher et son équipe ont sélectionné trois textes écrits à des époques différentes : La fille de Christophe Colomb, de Réjean Ducharme, qui date de la fin des années 1960 ; Je suis une maudite sauvagesse, que la première essayiste innue, An Antane Kapesh, a écrit dans les années 1970; Le virus et la proie, de Pierre Lefebvre, qui est tout récent.
« Ce cycle de lectures est assez politique », dit Martin Faucher, qui met à nouveau en scène La fille de Christophe Colomb, après avoir monté pour la première fois ce texte traitant de l’environnement il y a 27 ans au Théâtre d’Aujourd’hui.
Le texte de Pierre Lefebvre prend la forme d’une lettre adressée à un premier ministre imaginaire, alors que celui d’An Antane Kapesh, réédité chez Mémoire d’encrier en 2019, met en lumière « comment la présence blanche auprès de la communauté innue a été dévastatrice », explique Martin Faucher. « Lire ce texte sur scène en innu, avec des surtitres français, c’est un geste politique très fort. »
Sonder l’espace
Dans le spectacle Un temps pour tout, de Sovann Rochon-Prom Tep, l’énergie de la danse et de la musique hip-hop promet de transporter les enfants comme les adultes. La scène du Théâtre Maisonneuve, aménagée spécialement pour l’occasion, accueillera à la fois les interprètes et les spectateurs dans une formule intime. « C’est une façon de poser un regard différent sur notre territoire, ce qui constitue l’un des grands axes du programme 2021. »
Le désir de la rencontre
« De se rendre compte qu’en bout de piste, tout cela est possible, c’est une grande fierté. Je crois que nous avons réussi à faire un festival à l’image des autres programmes, qui n’est justement pas que dans la contrainte, mais qui a une vision artistique, une écriture qui parle à notre époque. »
Le septième spectacle présenté à la Place des Arts, La romance est pas morte, 2Fik!, propose un site de rencontre fictif, où l’artiste multidisciplinaire 2Fik incarne 100 personnages ratissant large sur le spectre de la diversité.
Le public est invité à interagir avec la plateforme, puis à visiter les coulisses au cœur de la Cinquième Salle. « C’est un spectacle très actuel qui porte sur nos modes de communication et sur les limites et les préjugés que peuvent amplifier les réseaux sociaux ou les sites de rencontre », d’expliquer le directeur artistique du FTA.
Ce désir de créer un lien avec l’autre et sa concrétisation mise à mal par la pandémie est au cœur du spectacle de 2Fik. Il résume bien l’élan qui porte cette quinzième année, élaborée à l’aveugle, sans savoir comment évolueraient les mesures sanitaires. « De se rendre compte qu’en bout de piste, tout cela est possible, c’est une grande fierté. Je crois que nous avons réussi à faire un festival à l’image des autres programmes, qui n’est justement pas que dans la contrainte, mais qui a une vision artistique, une écriture qui parle à notre époque. »
Le Festival TransAmériques a lieu du 26 mai au 12 juin 2021.