Jim Henson’s The Storyteller : quand nostalgie et technologie se rencontrent
Qui, dans son enfance, n’a jamais lu de livres pop-up ou suivi les indications de la fée Clochette pour tourner les pages d’une histoire de Disney? C’est ce même principe, mais en version 3D, que propose le livre animé par réalité augmentée, présenté pour une première fois en Amérique – à la Place des Arts – en collaboration avec PHI. Rencontre avec Paul Raphaël, cofondateur et chef de l’innovation chez Felix & Paul Studios, et coréalisateur de l’expérience immersive Jim Henson’s The Storyteller : Les sept corbeaux.

Pouvez-vous nous présenter la genèse du projet?
C’est notre première expérience en réalité augmentée. Felix & Paul Studios raconte des histoires immersives depuis plus de 10 ans, principalement grâce à la réalité virtuelle, qui offre une immersion totale. Avec la réalité augmentée, nous apportons le virtuel dans le monde réel.
La première question que nous nous sommes posée en explorant la réalité augmentée était : comment créer un contexte? En réalité virtuelle, le spectateur est plongé dans un univers entièrement contrôlé à 100 %. En réalité augmentée, cependant, nous ne contrôlons pas l’environnement; on peut être dans un salon, une cuisine ou n’importe quel autre lieu. Nous avons résolu ce problème en créant un contexte à partir d’un livre physique.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans le livre?
Ouvrir un livre est un rituel qui place une personne dans un état de réceptivité à un univers dans lequel elle ne se trouve pas physiquement. C’est ce qu’on appelle « the suspension of disbelief », qu’on retrouve aussi au cinéma. Il y a quelque chose qui se passe dans le cerveau qui fait que nous sommes capables de sympathiser avec ce que l’on voit sans constamment se rappeler que ce n’est pas vrai. C’est un phénomène qui n’est pas automatique; il faut permettre au spectateur de l’intégrer et ça se fait différemment selon le moyen d’expression utilisé. Donc, le livre apporte ce contexte et un aspect tactile : en tenant le livre, le spectateur tient aussi l’univers et les personnages par la réalité augmentée. Le livre sert également d’interface intuitive : on tourne simplement les pages pour avancer dans l’histoire, sans avoir besoin de comprendre des codes complexes.
Pourquoi avoir choisi Jim Henson’s Storyteller comme point de départ?
À l’époque, nous étions déjà en discussion avec la compagnie Jim Henson sur un autre projet qui n’a pas abouti. Nous leur avons parlé de notre idée de livre en réalité augmentée; la série télévisée Storyteller, créée dans les années 80 par Jim Henson, nous est apparue comme le concept parfait. Celle-ci s’appuyait sur des contes moins connus, comme ceux des frères Grimm, qu’elle racontait avec des marionnettes et des acteurs, en suivant la narration emblématique de John Hurt autour d’un feu de foyer. Nous avons voulu rester fidèle à l’esprit de la série en mettant le livre dans les mains du spectateur et le narrateur – en l’occurrence James Hyndman – dans ses oreilles, tout en modernisant l’esthétique grâce aux technologies actuelles. Nos personnages, bien qu’animés numériquement, sont basés sur des captures de mouvement d’acteurs humains, ce qui leur donne une authenticité rappelant les marionnettes originales. On voulait aussi raconter une histoire courte et universelle afin qu’elle puisse plaire au plus grand nombre.
Et pourquoi avoir choisi Les sept corbeaux comme première histoire?
Les sept corbeaux se déroule à la fois dans le monde réel, dans les airs et dans un espace imaginaire, ce qui nous permettait d’explorer trois différentes dimensions immersives. Certaines scènes se passent sur les pages du livre, d’autres dans l’espace entourant le spectateur. Dans Les sept corbeaux, il existe une symétrie entre l’univers réel et imaginaire, ce qui nous a offert plusieurs possibilités d’expérimentation pour créer l’émotion chez le spectateur.
Envisagez-vous de développer davantage d’histoires basées sur ce concept?
Oui, nous imaginons créer d’autres épisodes basés sur la série Storyteller, et même explorer d’autres types d’expériences éducatives ou mélangeant la lecture et les images avec des livres augmentés.
Ce projet a toujours été conçu comme un prototype pour une éventuelle plateforme de contenu à base de livres physiques qui seraient augmentés. Cela dit, le défi reste technologique : il n’y a pas encore suffisamment de casques capables de supporter ce type d’expérience, ce qui ne justifie pas sa mise en marché, et ajouter un livre physique augmente la complexité logistique.
Pour l’instant, on garde le projet dans notre petite poche et on présente Jim Henson’s The Storyteller : Les sept corbeaux à l’occasion; l’intérêt est là! L’expérience a été lancée il y a un an à Venise et c’est la première fois qu’on le présente depuis – nous sommes très heureux que ce soit à la Place des Arts à Montréal!
Tentez l’expérience gratuitement en réservant d’ici le 23 février 2025.

Josiane Aubuchon : entre autodérision et confidences
Des « jokes de totons », c’est facile, un peu mononcle, et moins bien vu qu’il y a plusieurs années. L’humoriste Josiane Aubuchon a toutefois réinventé le genre avec Le show de boules, où elle raconte les péripéties entourant sa réduction mammaire.
Article Entrevues Spectacle
Hamlet : danser une œuvre classique avec modernité
Cette tragédie de Shakespeare, incarnée uniquement par la danse, mélange les styles et est portée par neuf interprètes. Entrevue avec Robert Lepage et Guillaume Côté.
Article Entrevues Spectacle
Loui Mauffette : Ô Loup! et l’éternel cri de l’enfance
Dans le paysage culturel québécois, Loui Mauffette n’a nul pareil. S’épanouissant ces dernières années en tant qu’artiste multidisciplinaire, il a inventé son propre genre scénique, la « stonerie poétique ».
Article Entrevues Création
Mot pour mots avec Sylvain Émard
Sylvain Émard dévoilera Les champs magnétiques en première mondiale à la Cinquième Salle à la fin janvier.
Vidéo Entrevues Création